Evangile du dimanche

Méditer sept jours avec l’évangile du dimanche:

évangile du quinzième dimanche du temps ordinaire.

Année B

(Mc 6,7-13)


Méditation du dimanche: Présentation du texte du dimanche


En ce quinzième dimanche du temps ordinaire de l’année B, l’Église nous propose la lecture pour l’évangile dominicale du récit du premier envoi en mission des Douze dans l’évangile selon saint Marc. Ce récit suit immédiatement celui de la prédication de Jésus dans la synagogue de Nazareth que nous avons écouté la semaine dernière. Au début du passage lu la semaine dernière, il y avait une précision que nous n’avions peut-être pas relever: «ses disciples le suivirent» (Mc 6,1). Les disciples étaient donc présents auprès de Jésus lors de cette prédication. Cette présence n’est d’ailleurs pas surprenante. En Mc 3,14, rapportant le choix des Douze par Jésus, Marc en avait énoncé les motivations: «Il en institua Douze pour qu’ils soient avec lui, et pour les envoyer proclamer la Bonne nouvelle avec le pouvoir d’expulser les démons.» les Douze sont donc choisis pour deux missions: premièrement être avec Jésus, deuxièmement être envoyés proclamer la Bonne nouvelle avec le pouvoir d’expulser les démons. Le début du chapitre 6 de l’évangile selon saint Marc (Mc 6,1-13) illustre ces deux aspects de la mission des Douze. En Mc 6,1-6, les apôtres sont aux côtés de Jésus. En Mc 6,7-13, pour la première fois, les apôtres sont envoyés prêcher eux-mêmes. On pourrait dire qu’en mc 6,7-13, ils passent du statut de Douze compagnons de Jésus à celui d’apôtres au sens plein du terme puisque «apôtre» vient du verbe grec apostellô qui signifie «envoyer»

D’un autre côté il semble que la venue de Jésus à Nazareth a marqué l’ultime étape dans la formation des apôtres à la suite de laquelle ceux-ci sont désormais jugés pates à être envoyés en mission Or la leçon de l’épisode de Nazareth est quelque peu déconcertante: «Un prophète n’est méprisé que dans son pays, sa parenté, et sa maison.» Là où Jésus était connu, là où l’on aurait pu s’attendre qu’il soit triomphalement accueilli, fêté comme il se doit pour les succès de son enseignement, les miracles qu’il a réalisés, il se heurte au contraire à l’absence de foi» de ses compatriotes qui refusent de croire en cet «artisan» qu’ils connaissent de bien en qui ils refusent de voir un maître de sagesse au point que Jésus ne peut réaliser en ce lieu de «signes de puissances» (dynameis traduit par «miracles» dans le texte liturgique). il ne peut que guérir quelques malades en leur imposant els mains. la seule compétence que ses compatriotes reconnaissent à jésus, c’est celle de guérisseur des corps, qui peut avoir une efficacité immédiate pour soulager les douleurs mais ils refusent de voir en lui le médecin des âmes aussi bien que des corps venus non seulement guérir mais sauver. La leçon est rude pour les futurs apôtres mais certainement nécessaire pour compléter leur formation.: ils doivent comprendre que le succès de leur mission ne dépendra pas de leur qualités personnelles, des connaissances qu’ils peuvent avoir en tel ou tel lieu puisqu’au contraire l’exemple de leur maître leur a démontré que le fait d’être connu en un lieu, loin d’être un atout se révèle un obstacle au bon accomplissement de la mission. Le succès dépendra du fait que leur parole sera reconnu pour ce qu’lle est la parole de Dieu.

Notre texte peut s’articuler en quatre points

  1. L’introduction qui reprend des éléments de l’appel des Douze au chapitre 3 (v. 7)
  2. Une première série de consignes pour la mission indaquant ce qu’il ne faut pas prendre (v. 8-9)
  3. Une série de consignes portant sur l’accueil des disciples. v. 10-11
  4. un bref récit de la première mission v. 12-13.


Méditation du lundi: Les différents envois en mission dans les évangiles


Avant d’étudier plus en détail le discours d’envoi en mission de l’évangile selon saint Marc, il convient de relever les textes parallèles que l’on trouve dans les évangiles selon saint Matthieu et saint Luc. L’évangile selon saint Matthieu comprend un grand discours d’envoi en mission qui occupe la quasi-totalité du chapitre 10. La première de ce discours Mt 10,5-15 comprend un certain nombre de consignes données à Jésus à ses disciples dont certaines recoupent celles données en Mc 6,7-13. L’évangile selon saint Luc lui comprend deux discours d’envoi en mission à deux groupes différents. Le premier discours d’envoi en mission (Lc 9,3-5) peu développé est adressé aux douze. Il présente de nombreux points communs avec le texte de saint Marc. Le second discours d’envoi en mission est adressée aux soixante-douze disciples, un groupe que saint Luc est le seul à mentionne Lc 10,2-12). Il s’agit d’un discours plus développé qui présente des points communs avec celui de saint Matthieu. D’après la plupart des exégètes, saint Luc a reproduit deux sources différentes sur l’envoi des disciples en mission. La première de ces deux sources ne serait autre que l’évangile selon saint Marc. De fait Lc 9, 1-7 présente un texte proche de celui de que nous étudions. La seconde source serait un recueil perdu des paroles de Jésus que les exégètes reconstituent à partir de saint Matthieu et de saint Luc absents de saint Marc et auquel on donne le nom de Q, première lettre du mot allemand quelle qui signifie source. Dans le cas présent saint Luc reproduit en y apportant quelques modifications ces deux sources alors que saint Matthieu aurait réalisé une synthèse personnelle entre ces deux documents. Ces considérations pourront paraître un peu techniques. On peut en retenir tout d’abord que notre texte est l’un des plus anciens témoignages sur l’envoi des disciples en mission et qu’il a été repris par saint Matthieu et saint Luc. On peut noter ensuite que notre texte n’est pas le seul témoignage ancien sur l’envoi en mission des apôtres. Le discours d’envoi en mission des soixante-douze disciples chez Luc représente aussi une tradition ancienne et différente. Ces deux traditions s’éclairent mutuellement: si elles présentent une structure assez semblable deux séries de consignes: la première concernant ce que les disciples (ne) doivent (pas) prendre avec eux, la seconde sur la manière dont les disciples doivent se comporter là où ils ont accueillis, l’équilibre entre ces deux séries de consignes est différent dans les deux traditions. la tradition rapportée par saint Marc insiste davantage sur ce que les disciples ne doivent pas prendre, alors que la tradition représentée par Lc 10,2-12 met plutôt l’accent sur le comportement des disciples vis-à-vis de ceux qui les accueillent ou ne les accueillent pas sur ce second point la comparaison avec Lc 10,2-12 peut permettre d’éclairer des points que le texte succinct de saint Marc laisse dans l’obscurité.


Méditation du mardi : Le verset introductif


L’introduction de notre évangile reprend le récit de l’appel des Douze en Mc 3,13-15. En Mc 3,13, Jésus «appelle» (proskaleitai ) ceux qu’il voulaient; En Mc 6,7, il «appelle» (proskaleitai) les Douze; Dans les deux cas nous avons le même verbe proskaleomai (littéralement «appeler auprès de soi» au présent). Dans l’évangile selon saint Marc, ce verbe proskaeomai a toujours pour sujet Jésus et pour complément les apôtres. On le retrouve en Mc 8,1, deuxième distribution es pains, en Mc 10,42 après la demande des deux fils de Zébédée de siéger à droite et à gauche Jésus en en Mc 12,43, au moment de l’obole de la veuve. En Mc 3,14-15 Jésus appelle les disciples pour les «envoyer» (apostellô) proclamer la Bonne Nouvelle avec le pouvoir d’expulser les démons (exousia ekballein ta daimonia). En Mc 6,7, Jésus commence à les «envoyer» (apostellô) deux par deux et il leur donne «autorité sur les esprits impurs» (exousia tôn pneumatôn tôn akathartôn). Le verbe apostellô a le sens technique «d’envoyer en mission» que l’on retrouve en Mc 11,13 où Jésus envoie deux de ses disciples pour aller chercher l’ânon sur lequel il fera son entrée triomphale à Jérusalem et en Mc 11,13où Jésus envoie deux de ses disciples pour faire les préparatifs de la Pâque. On peut remarquer que dans ces deux textes, Jésus envoie deux de ses disciples. L’envoi» deux par deux» semble donc être une caractéristique de l’envoi en mission des apôtres. Le disciple de jésus n’est pas seul mais accompagné. La mission n’est pas une tâche individuelle où serait mise en avant la performance individuelle mais un travail d’équipe. Chaque missionnaire est ne quelque sorte le garant de l’autre. Leurs bonnes relations témoignent de la charité fraternelle qui les unit. Cette mission à deux permet d’empêcher que l’un s’écarte trop de la ligne fixée. Cette règle de la mission à deux se retrouve dans la description des premières missions dans le livre des actes Apôtres; Paul n’opère jamais seul il est en compagnie de Barnabé lors de son premier voyage missionnaire puis est accompagné ensuite par Silas. Dans les deux textes le même mot exousia décrit le rapport des envoyés avec les «démons» ou «esprits mauvais». en Mc 3,15, exousia est traduit par «pouvoir», en Mc 6,7 par «autorité» Dans les deux textes il semble qu’exousia renvoie à la capacité de se faire obéir des démons Pour saint Marc «démons» et «esprits impurs» semblent être des expressions équivalentes; la meilleure preuve en est qu’à la fin de notre texte en Mc 6,13 il signale que les disciples «expulsaient de nombreux démons» ce qui semble bien être la mise en œuvre de «l’autorité sur les esprits impurs que leur a donné le Christ.» Mc 6,7 entretient des rapports étroits avec Mc 3,13-15. Ce verset se présente comme la mise en application d’un programme qui avait déjà été dévoilé au moment du choix des Douze. Le lecteur savait déjà que les Douze avaient et choisi pour être envoyés et quelle autorité leur serait confiée. La seule précision nouvelle est qu’ils sont envoyés deux par deux. On peut s’étonner que saint Marc ne mentionne pas la guérison des maladies parmi els tâches des Douze que ce soit en mc 3,13-15 ou en Mc 6,7 alors qu’à la fin du texte en Mc 6,1» il mentionne les nombreuses guérisons que les Douze effectuent. On peut penser que saint Luc a été sensible à ce manque et que c’est pour cela qu’en Lc 9,1, il ajoute à la formule «il leur donne pouvoir et autorité sur tous les démons» reprise de saint Marc «et de même pour faire des guérisons.»


Méditation du mercredi : Ce qu’il faut et ce qu’il ne faut pas emporter pour la route


La première série de consignes pour la mission est paradoxalement une liste de ce qu’il ne faut pas emporter. Quand on prépare un voyage, on dresse souvent une liste de ce que l’on doit emporter (y compris l’incontournable «brosse à dents») Jésus lui dit à ses disciples ce qu’ils ne doivent as emporter. la liste des interdits est d’ailleurs moins stricte chez saint Marc qui contrairement aux parallèles de saint Luc et de saint Matthieu tolère un seul bâton et des sandales. En effet, en Mt 10,9-10, sandales et bâton sont interdits «Ne vous procurez ni or ni argent ni monnaie de cuivre à mettre dans votre ceinture, ni sac pour la route, ni tunique de rechange, ni sandales, ni bâton.» En Lc 9,3, il n’est pas question de sandales mais le bâton est interdit: «Ne prenez rien pour la route, ni bâton, ni sac ni pain, ni argent; n’ayez pas de tunique de rechange.» En Lc 10,4 il n’est pas question de bâton, mais les sandales sont interdites: «Ne portez, ni bourse, ni sac, ni sandales.» Contrairement aux listes que l’on trouve chez saint Matthieu et chez saint Luc, le Christ chez saint Marc autorise le bâton et les sandales, deux éléments qui concernent la route, le voyage lui-même. Jésus, chez saint Marc, veut que ses disciples puissent voyager confortablement sans s’abîmer les pieds et ayant le soutien d’un bâton face aux dangers de la route. Il y là une préoccupation concrète que la rudesse du chemin n’entrave pas la mission. Il est possible que la prescription de prendre seulement un bâton se soit transformé en prescriptions négatives chez saint Matthieu et chez saint Luc en raison du symbolisme ambivalent du bâton. Le bâton est aussi une arme et un insigne de pouvoir. Saint Matthieu et saint Luc ont donc pu considérer qu’un bâton convenait mal à des disciples envoyés «comme des brebis au milieu des loups» (Mt 10,16// Lc 10,3). En revanche saint Luc et saint Matthieu sont d’accord avec saint Marc quant à la défense faite aux disciples de prendre toute nourriture et tout argent c’est-à-dire tout moyen de s’en procurer. Les disciples se trouvent dans une situation de dépendance par rapport à ceux qu’ils vont rencontrer. N’ayant pas les moyens de subsister par eux-mêmes ils doivent entièrement s’en remettre à la charité de ceux auxquels ils vont annoncer la Bonne Nouvelle. En quelque sorte les disciples sont obligés de donner de ce que Jésus leur a confiés, de la Bonne Nouvelle de leur autorité sur les démons pour obtenir en retour de quoi subsister. L’inconfort de leur situation les oblige à partager ce qu’ils sont. Dans la version de saint Matthieu L’énumération de ce qu’ils ne doivent pas emporter est close par la formule «L’ouvrier, en effet, mérite sa nourriture» qui suggère que ce qui leur sera donné pour leur subsistance sera le salaire de leur travail missionnaire. Parti sans rien les oblige à travailler à la mission pour subsister. À l’interdiction de prendre de la nourriture ou de l’argent s’ajoute celle de prendre une tunique de rechange. Les disciples sont appelé à ne pas soucier de leur nourriture et de leur vêtement comme dans la parole rapportée par saint Matthieu et saint Luc (Mt 7,25// Lc 12,22): «Ne vous souciez par pour votre vie de ce que vous mangerez, ni pour votre corps de quoi vous le vêtirez.»


Méditation du jeudi: Ceux qui accueillent et ceux qui n’accueillent pas.


La seconde série de consignes séparée de la première par la reprise du verbe dire: «Mais il leur disait encore» (kai elegen autois) qui paraît introduire le style direct alors que saint Marc l’a déjà employé auparavant. L’une des caractéristiques du grec de saint Marc est e recours fréquent au style direct (souvent sans transition dans un passage au style indirect): c’est une caractéristique du langage parlé.

Cette seconde série de consignes concerne l’attitude à adopter par les missionnaires par rapport à ceux qui les accueillent et à ceux qui ne les accueillent pas.

La première consigne est de rester dans la même maison. Saint Marc recommande en quelque sorte la stabilité dans l’itinérance. Le texte parallèle de Lc 10,7 est plus détaillée quant à l’attitude à adopter: «Restez dans cette maison mangeant et buvant ce que l’on vous sert; car l’ouvrier mérite son salaire. Ne passez par de maison en maison.» La version de saint Luc suggère que cette prescription de stabilité a pour but d’éviter que les missionnaires profitent de la situation pour se faire recevoir par différentes personnes dans la même et qu’ainsi ils s’installent dans cette ville et négligent leur mission. Il est possible que par la suite le respect de ces prescriptions ait permis de distinguer les authentiques missionnaires d’usurpateurs désireux de se faire loger gratis.

L’attitude des disciples qui ne sont pas accueillis est décrite sobrement par saint Marc:«Si dans une localité on refuse de vous accueillir et de vous écouter partez et secouez la poussière de vos pieds, ce sera pour eux un témoignage.» La signification du geste de secouer la poussière de ses pieds ainsi que la nature du témoignage ne sont pas ici précisées. Le texte parallèle de saint Luc apporte de ce point de vue des précisions importantes: «Mais dans toutes les villes où vous entrerez et où vous ne serez pas accueillis, allez sur les places et dites: Même la poussière de votre ville collée à vos pieds nous vous l’enlevons. Toutefois sachez-le: le règne de Dieu s’est approché. ” Je vous le déclare: au dernier jour Sodome sera mieux traitée que cette ville.»

La version plus détaillée précise la signification du geste: secouer la poussière de ses pieds: c’est vouloir en reine garder, même pas la poussière de la ville qui a refus de revoir les missionnaires, c’est en quelque sorte ne rien vouloir avoir de commun avec ses habitants. Ll ne s’agit pas d’enter en conflit mais de de prononcer une séparation radicale avec ceux qui refusent d’accueillir les missionnaires et d’écouter la Parole. La nature du témoignage est aussi précisée: ce témoignage se place dans une double perspective eschatologique. Tout d’abord il est témoignage pour ceux qui voient ce geste de l’imminence de la venue royaume de Dieu. Même s’ils ne veulent ni recevoir les missionnaires ni les écouter, les habitants du lieu sont quand même informés de l’imminence de la venue du règne de Dieu. Mais ce geste est aussi un témoignage contre les habitants de ce lieu dans la perspective du jugement. Au jour du Jugement, ce geste attestera que les habitants du lieu ont refusé de recevoir les missionnaires de le Bonne Nouvelle du règne de Dieu tout comme les habitants de Sodome avaient violé les règles de l’hospitalité en voulant abuser des deux étrangers – qui étaient des envoyés de Dieu – accueillis par Loth. La comparaison du sort des habitants de ce lieu avec celui des habitants de Sodome se justifie donc puisque dans les deux cas c’est le refus d’accueillir des envoyés de Dieu qui est puni.


Méditation du vendredi: Le récit de la mission des disciples


Notre texte conclut par un bref récit de la mission des disciples qui comprend deux versets. Dans le premier le v.12 les disciples sont sujets du verbe «proclamer» (kèrussô). Ce verbe avait été déjà employé en Mc 3,14 lors du récit de l’institution des Douze que Jésus avait choisi «pour les envoyer proclamer la Bonne Nouvelle. On retrouve en conclusion du récit le parallélisme avec le récit de l’institution des douze que l’on avait déjà repéré au début de notre texte. Toutefois la proclamation ne concerne pas ici la Bonne Nouvelle mais la nécessité de se convertir. Les disciples reprennent ici la proclamation initiale de Jésus lors de son ministère en Galilée telle qu’elle est décrite en Mc 1,14-15: «Après l’arrestation de Jean, Jésus partit pour la Galilée proclamer l’Évangile de Dieu; il disait: “les temps sont accomplis: le règne de Dieu est tout proche: Convertissez-vous et croyez à l’Évangile.”» La mission des disciples donc s’inscrit donc dans la continuité de celle de Jésus. Le v. 13 décrit les signes qui accompagnent cette proclamation. Le premier de ces signes est l’expulsion de nombreux démons. Il atteste de «l’autorité sur les esprits impurs que Jésus a donné aux disciples» d’après le v. 7. Le second de ses signes est la guérison de nombreux malades. On put relever un contraste entre la conclusion de notre texte et celle du texte précédent relatant la visite te de Jésus à la synagogue de Nazareth. À la fin du texte précédent Jésus guérissait «seulement quelques malades en leur imposant les mains» Ici les disciples «font des onctions d’huile à de nombreux malades et les guérissent. Il y une double opposition à la fois quant au procédé de guérison onctions d’huile vs. imposition des mains et quant au nombre des bénéficiaires quelques malades vs. de nombreux malades. À Nazareth où Jésus était connu, le geste personnel d’imposition des mains n’obtenait qu’un succès relatif; dans les villages qu’ils parcourent lors de la mission et où ils sont inconnus, le geste d’onction d’huile qui n’implique pas un investissement personnel du guérisseur obtient un large succès. Les guérisons qui accompagnent les missionnaires n’attestent pas du talent personnel du guérisseur, elles sont signes de la venue imminente du règne de Dieu qui attestent la véracité de leur appel à la conversion. On peut aussi remarquer que de nombreuses expulsions de démons et de nombreuses guérisons avaient eu lieu à Capharnaüm, après le coucher du soleil, le premier sabbat où Jésus avait prêché à la synagogue (Mc 1,34). Un dernier point à noter est que les différents éléments du récit de cette première mission des disciples se retrouve dans le second envoi en mission des disciples par Jésus ressuscité en Mc 16où Jésus leur demande de «Proclamez (kèrussô) l’Évangile à toute la création» et relève parmi les signes «accompagnant ceux qui deviendront croyants»; «en mon nom ils expulseront des démons» et «ils imposeront les mais aux malades, et les malades s’en trouveront bien.


Méditation du samedi: Être envoyés en mission dans le monde d’aujourd’hui.


En lisant ce texte nous pouvons nous demander en quoi il concerne, nous baptisés du vingt et unième siècle qui sommes appelés par notre baptême à proclamer l’évangile dans un monde fort différent de celui que ce texte décrit. que peut signifier aujourd’hui recevoir autorité sur les esprits impurs? L’expression «esprit impur» renvoie à une réalité qui est difficile à appréhender dans notre culture contemporaine. Elle suppose une représentation de l’homme et du monde selon laquelle chaque âme peut être habitée par un esprit invisible. Une telle conception est assez éloignée de celle de la médecine moderne et il est tentant d’adapter ce discours à nos représentations modernes et à considérer que les esprits impurs relèveraient de la catégorie de la maladie mentale. Mais le traitement de la maladie mentale requiert de nos jours des spécialistes que tous les baptisés ne peuvent prétendre être. D’une manière pragmatique, on peut essayer de voir quels sont les effets des esprit impurs dans les évangiles: on remarque que les esprits impurs amènent des conduites qui sont, en leur principe sont des refus de la vie. On peut donc assimiler les esprits impurs aux pulsions de morts qui habitent chacun d’entre nous. Jésus donne à ses disciples la maitrise de ces pulsions. Cette maîtrise provient en partie de son enseignement qui est parole de vie. La parole de Dieu est un instrument qui doit nous aider à maîtriser les pulsions de mort. Une autre clé est que les disciples sont envoyés deux par deux. Chaque personne seul se trouve en situation de fragilité face à ses propres pulsions de mort. La présence d’un autre soutient et réconforte. L’envoi deux par deux des missionnaires demeurent à mon avis un trait indispensable d’autant plus dans notre société qui promeut la réussite individuelle. Aller deux par deux c’est accepter de ne pas tirer que le résultat de la mission ne dépend de soit seul, de ses qualités personnelles mais que le résultat (pou l’échec) est partagé avec un autre. Les consignes sur ce qu’il faut prendre pour la route peuvent aussi paraître désuètes. Certes la marche est une activité «tendance» de nos jours et les chemins de pèlerinage sont de nouveau fréquentés. Avoir soin de ses pieds prendre un bâton pour la route, voilà qui parle à nos contemporains marcheurs. Cependant il y une grande différence entre la marche comme activité de loisir et la marche telle qu’elle était pratiquée au temps de Jésus qui était finalement le principal moyen de locomotion. Lorsque nous voulons déplacer «sérieusement» sur des distances plus ou moins longues nous prenons la voiture, le tain, l’avion mais nous nous déplaçons rarement à pied. Notre rythme de vie n’est plus celui des disciples de Jésuset certainement l’on doit en tenir compte lorsqu’il faut interpréter pour aujourd’hui les consignes qu’il donne. Toutefois la consigne de se placer dans une situation de dépendance par rapport à ceux auxquels on annonce la parole demeure fondamentale. La tentation du missionnaire est de se considérer comme le détenteur d’un savoir que ne possèdent pas ceux auquel il annonce la Bonne Nouvelle et donc de se placer dans une position supérieure à la leur. Pour échapper à cette tentation, Jésus exige de ses disciples qu’il se mettent sous le pouvoir des ceux auxquels ils prêchent, comme lui Jésus le Fils de l’homme s’est livré au pouvoir des hommes.

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