13 Janvier
Saint Aelred Abbé de Rievaulx
(1110-1167)
Saint Aelred de Rievaulx (1109-1167) est un moine cistercien qui, en 1147, devint le troisième abbé de Rievaulx . Il nous a laissé de nombreux écrits et est considéré comme l'un des moines cisterciens les plus influents d'Angleterre de son temps On l’appelle le docteur de la charité et de l'amitié.
Celui qu’on nomme le saint Bernard anglais, saint Alred de Riévaulx, habitait le Nord de l'Angleterre. Enfant remarquablement doué, il fut élevé à la cour d'Écosse avec le fils du roi. Lorsqu'il eut compris que rien ne doit être préféré à l'amour du Christ, il entra au monastère de Rielvaux, en 1135.
"Docteur de la charité et de l'amitié"
D'une grande douceur au milieu de ses frères, il les surpassait tous par sa vertu. En 1143, il fut envoyé comme abbé dans la fondation de Rievaulx à Revesby, près de Lincoln. Quatre ans plus tard, la communauté de Rievaulx l'élisait comme abbé. Aelred voulaitt que la gloire propre de sa maison soit d'être plus que toute autre la demeure de la charité et de la paix. De cette vertu qui lui était si agréable, il devait parler avec une grâce singulière dans les traités qu'il nous a laissés. Le “Miroir de la Charité”, et plus encore, le “Traité de l’amitié spirituelle” ont fait d'Aelred le “Docteur de la charité”, de l’amitié humaine tout spécialement, qui mène à Dieu.
Pendant les dix dernières années de sa vie, il fut sujet à de violentes douleurs d'entrailles. Souvent, sous la pression de ces souffrances il s'alitait dans une cabane et les moines venaient trouver leur Père pour le consoler ; assis à vingt ou trente chaque jour, ils s'entretenaient avec lui de l'agrément spirituel de l’Écriture et des observances de l'Ordre. À sa mort, survenue le 12 janvier 1167, on put lui rendre ce beau témoignage que, jamais, depuis qu'il avait pris l'habit, le soleil ne s'était couché sur son âme troublée par un manque de patience.
Aelred fait partie de ce qu'on appelle quelquefois la "première génération" des auteurs spirituels cisterciens, avec Saint Bernard de Clairvaux, le Bienheureux Guillaume de Saint Thierry et le Bienheureux Guerric d'Igny.
La Vierge Marie est particulièrement présente dans les grandes thématiques d’Aelred de Rievaulx.
Icône copte. Le Christ et son ami Ménas.
L’amitié humaine et le Seigneur des vertus
L'amitié a rapport à l'éternité, à Dieu, au Seigneur des vertus
« L'ami aime toujours » (Pr 17, 17).
Il n'a donc jamais été un véritable ami, celui qui a pu blesser quelqu'un après l'avoir admis dans son amitié ; et d'autre part, il n'a jamais connu les vraies joies de l'amitié, celui qui, ayant aimé, cesse d'aimer parce qu'il se sent blessé.
« Un ami aime toujours ». Même combattu, blessé, livré aux flammes, même cloué à la croix, « un ami aime toujours ».
Les vrais amis furent rares parmi les païens parce qu'ils ne connaissaient pas le Seigneur qui donne les vertus.
« Le Seigneur des vertus, c'est lui le roi de gloire » (Ps 23, 10).
La charité universelle est un précepte, l'amitié est autre chose
"La loi de la charité nous commande d'aimer non seulement nos amis mais encore nos ennemis.
Or, nous ne révélons facilement notre cœur et ses secrets qu'à nos amis, qui, de leur côté, manifestent la même confiance à notre égard."
L'amitié est un degré dans la connaissance de l'amour de Dieu
"Pour ceux que l'amitié unit étroitement, tout n'est plus que joie, assurance, charme et douceur.
Or tout cela commence dans le Christ, progresse grâce au Christ et trouve sa perfection en lui.
Et n'est-il pas que du Christ inspirateur de mon amitié pour quelqu'un, je m'élève jusqu'au Christ qui m'offre son amitié. Rien n'est difficile en cela, c'est un élan de l'âme qui suit un élan de l'âme."
Saint Aelred de Rievaulx est d'une grande sagesse concernant la plus belle aventure humaine : l'amitié. Il sait qu'il y a parfois des ruptures. Mais il y a une manière de rompre, avec respect. Puisse la Vierge de Nazareth nous le faire comprendre, de l'intérieur...
« Si tu as tiré l'épée contre ton ami, ne te désespère pas: il peut revenir; si tu as ouvert la bouche contre ton ami, ne crains pas: une réconciliation est possible. » (Sirac 22, 21-22)
Si ton ami a préféré son opinion à la tienne, ne crois pas que l'amitié doive être rompue pour autant.
L'Ecclésiaste continue : « sauf le cas d'outrage, mépris, trahison d'un secret, coup perfide, car alors ton ami s'en ira ». (Sirac 22, 22). Comme il a dit : « Celui qui insulte son ami, rompt l'amitié » (Sirac 22, 20).
Si, après avoir admis un ami, tu dois endurer de sa part de tels manques d'égards,
il ne faut pas rompre brusquement, mais dénouer peu à peu les liens de l'amitié.
Il faut le respecter et, s'il faut cesser de lui confier ses pensées intimes, il ne faut jamais cependant lui retirer ton affection, ni lui refuser une aide ou un conseil.
S'il en arrive à des excès tels que les insultes ou les blasphèmes, respecte encore ton pacte et la charité. Que la faute soit du côté qui fait l'injure, non du côté de celui qui la reçoit.
Il est un cas cependant où la rupture immédiate s'impose : c'est lorsqu'un homme fait du tort à son père, à sa patrie, à ses concitoyens, à ses subordonnés ou à ses amis. Car il faut faire passer le bien du grand nombre avant l'amour d'un seul.
Le cœur humain désire l'amitié
« L'amitié spirituelle, la seule vraie, n'a aucun profit temporel en vue. Elle n'a pas de cause en dehors d'elle-même. Le cœur humain la désire instinctivement pour sa propre valeur. Son fruit et sa récompense ne sont autre qu'elle-même.
L'amitié doit être stable et durer toujours. Elle est une image de l'éternité.
Aussi ne devons nous pas changer d'amis au gré de nos caprices, comme font les enfants.
Personne n'est plus haïssable que celui que ne respecte pas l'amitié. Rien ne tourmente plus le cœur que d'être abandonné ou attaqué par un ami.
Il importe donc de mettre le plus grand soin au choix d'un ami. »
Choisir un ami, en tenant compte de ses défauts
« Certains défauts rendent ceux qui en sont affligés incapables de respecter les lois et les droits de l'amitié.
Il ne faut donc pas facilement accorder son amitié aux colériques, aux instables, aux soupçonneux, et aux bavards. »
Si leurs manières et leur conduite nous plaisent par ailleurs, il faut essayer de les guérir et de les rendre aptes à l'amitié.
Il n'est certes pas facile de trouver quelqu'un qui ne soit souvent sous l'empire de ces passions.
Un grand nombre cependant les domine : Ils répriment la colère par la patience, s’entraînent à une constante gravitée pour combattre la légèreté ; dissipent leurs soupçons en pensant plutôt aux témoignages d'affection, et mettent un frein à leur langue en lui imposant le silence.
Je les préfèrerais même comme amis, car par la lutte qu'ils font à leurs défauts, ils se sont exercés à la vertu."
Les points à éprouver chez un ami
« -La fidélité
Elle est indispensable : elle te permettra de t'ouvrir à lui en toute sécurité.
-Une intention droite :
L'intention droite ne doit avoir que Dieu en vue et le bien même de l'amitié.
- Un bon jugement :
Un bon jugement fera agir à bon escient, en temps et en lieux opportuns.
- La patience :
Sa patience doit être éprouvée également, car il ne faut qu'il se plaigne s'il est repris, ni qu'il prenne de haut celui qui lui fait une remarque.
Enfin, il faut savoir supporter des ennuis pour son ami. »
Une fois choisi et éprouvé, il faut garder son ami...
« Nous le favoriserons de nos bienfaits tout en ne perdant jamais de vue son vrai bien.
L'affection que nous lui témoignerons le fera participer à notre bonheur intime.
La confiance nous permettra de lui révéler nos secrets et nos projets...
Nous parlerons avec notre ami des évènements heureux ou malheureux, nous lui dirons nos pensées, celles qui nous font du bien ou celles qui nous font du tort, et nous converserons librement avec lui de toutes ces choses qu'on enseigne ou qu'on apprend. »
Source :
-Aelred de Rivaulx (1110-1167), De l'amitié spirituelle, In : saint Aelred de Rivaulx, Les éditions du Soleil levant, 1960, p. 169-174 (extraits par F. Breynaert).
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